De l'amitié rotarienne

föstudagur, 10. september 2010
Pour bien comprendre les spécificités de l'amitié rotarienne il faut la placer dans le contexte de l'amitié tout court. L'étymologie nous révèle des éléments aussi intéressants qu'étonnants: Dérivé du latin amicitia, le terme connu aujourd'hui se forme vers 1380 via amistet (XIe s.) et amistié (1170). Très longtemps le mot a gardé les deux contextes "fidélité" et "érotisme". Dans le langage moderne, les linguistes distinguent cinq acceptions, dont la plus importante nous concerne: "Sentiment d'affection ou de sympathie d'une personne pour une autre, ou entre deux, plusieurs personnes, qui ne se fonde ni sur la parenté, ni sur l'attrait sexuel; relations qui en résultent."
Les documents officiels du Rotary sont très parcimonieux avec le terme "amitié". L'annuaire présente le but principal du Rotary, l'idéal de servir. Pour y arriver, le Rotary s'engage entre autre à "mettre à profit les relations et contacts pour servir l'intérêt général". Il est étonnant de constater que les termes "amitié/amical" ne figurent pas dans cette versions française (introduire l'adjectif "amicaux" après les "contacts" aurait été facile!), contrairement aux deux autres langues nationales: "Pflege der Freundschaft als einer Gelegenheit, sich andern nützlich zu erweisen"; "promuovere e sviluppare relazioni amichevoli fra i propri membri per renderli meglio atti a servire l'interesse generale." Dans la version originel nous lisons: "The development of acquaintance as an opportunity for service." Constatons donc que la version française est plus proche de l'anglais assez sec que l'allemand et l'italien que je préfère personnellement.

La publication éditée par les trois districts suisses pour les 100 ans du Rotary en 2005 contient un article intitulé "Le privilège de servir" avec le surtitre "Des amitiés en guise de remerciements". En d'autres termes: Servir avec d'autres crée des amitiés. "Il ne suffit donc pas de faire partie du Rotary pour se qualifier de Rotarien. Il faut aussi s'identifier à l'idéal de servir et à celui de l'amitié." Et plus loin: "Etre présent signifie participer aux actions et aux projets que le club et le district organisent. Mais être présent offre aussi un privilège – celui de rencontrer des amis animés par le même enthousiasme, les mêmes convictions et les mêmes objectifs et avec lesquels on pourrait échanger ses opinions, ses expériences et ses connaissances." Les amitiés sont importantes "car ce sont elles qui créent l'atmosphère propice à l'idéal de servir".

C'est la corrélation étroite entre amitié et servir qui sort très clairement. Avoir une bonne présence, échanger avec les amis, écouter des conférences enrichissantes, entreprendre des sorties ensemble, les repas communs et les verres d'amitié: Ce sont, certes, des éléments appréciables et fort appréciés par nous tous, mais ils s'avèrent incomplets sans "cultiver l'idéal de servir". N'est-ce pas ce dernier qui fait la différence crucial entre le Rotary un club de camarades?

Une question se pose: Peut-on être ami, d'un jour à l'autre, avec une cinquantaine de personnes inconnues? Certainement pas! Et nous savons tous que ceci n'est pas possible nécessairement, même après cinq ans d'affiliation. Ce qui doit s'installer par contre c'est une "amitié de respect et d'appréciation mutuelle". Mais le risque de petits groupes de "préférés" existe toujours. Pourquoi ne pas faire un effort et se mettre chaque mercredi à côté de quelqu'un d'autre?
Tout ceci et encore beaucoup plus est offert par l'amitié rotarienne, un vrai pactole pour des rencontres inattendues et fascinantes. Qu'est-ce donc, l'amitié rotarienne? Un sentiment de sympathie régi par un grand but commun, servir, et par un fondement éthique partagé, ce qui est la base de la confiance entre les amis rotariens.

Rot. Martin R.Schärer
Vevey-Montreux-Riviera